22 septembre 2021

Avis sur le projet de périmètre du site patrimonial remarquable

 



Société pour la Protection

des Paysages et de l'Esthétique

 de la France

Association reconnue d’utilité publique en 1936

Inès Champetier de Ribes,

Correspondante pour Fontainebleau

inesderibes@gmail.com

104, rue Saint Merry 77300 Fontainebleau

 



Comité de défense d'action

et de sauvegarde d'Avon

 

Association déclarée 27 avril 1976 JO 9 mai 1976

Association agréée CU  article L. 132-12 Arrêté préfectoral 2017/CS/38 du 2 mai 2017

Site : avon-cdas.blogspot.com    

Courriel : cdas-avon@orange.fr

Maison dans la Vallée, case 18 ;  27, rue du Vieux Ru -  77210 Avon



Fontainebleau Patrimoine

 

 

Association loi 1901 n° 9741 déclarée au

JORF du 11 décembre 1996 p. 5454

Site : fontainebleau-patrimoine.blogspot.fr

echosbleau@gmail.com    -  01 60 74 80 33

24, Bd Thiers 77300 Fontainebleau



Société de Sauvegarde de

La  Forêt de Fontainebleau et de

la Vallée de la Seine

Association loi 1901 JORF du 15 février 2014 p. 749 RNA n° W774005423 n° SIREN : 800430183

foret-de-fontainebleau.blogspot.com secretariat.SSFFVS@gmail.com

24 bd Thiers 77300 Fontainebleau

 



 

Enquête publique du 21 septembre 2021 au 22 octobre 2021

préalable au classement du site patrimonial remarquable de Fontainebleau-Avon (détermination du périmètre)

Observations des associations de défense du patrimoine

 

 

SOMMAIRE

 

 

Sommaire

Introduction

Opinion générale des associations

Note contextuelle

I. Observations de fond sur le périmètre

A. FONTAINEBLEAU

i) Zones exclues du Bréau et Subsistances

ii) Justifications de la nécessité de réintégration

B. AVON

i) secteur du Parc du Bel Ebat ou du Bois des Carmes et de l'ensemble des espaces entourant le Prieuré des Basses Loges

Propositions de modification du périmètre

ii) Hauts d'Avon au sud de la rue Gambetta

II. Observations préalables sur le contenu

Conclusions

 

INTRODUCTION

 

OPINION GÉNÉRALE DES ASSOCIATIONS

 

Les présentes observations s'inscrivent dans le cadre de deux processus juridiquement distincts mais liés l'un à l'autre.

Le ministère de la Culture, sur la recommandation de collectivités locales, sollicite l'UNESCO pour étendre le périmètre du site du patrimoine mondial.

Une telle extension impose aux autorités nationales et territoriales de prendre des mesures de gestion et notamment la création d'une zone tampon : c'est la création d'un "site patrimonial remarquable" (SPR), du code du patrimoine qui a été choisi.

 

Les présentes signataires, associations de défense du patrimoine naturel et culturel, n'ont été associées à aucun des processus du patrimoine mondial comme du SPR. Les présentes observations sont relatives aux documents qu'elles ont pu se procurer par elles-mêmes, elles n'arrivent donc pas trop tard mais quand elles peuvent. Le comité de pilotage de la SPR est composé d'élus des trois collectivités (CAPF, Villes d'Avon et de Fontainebleau), de l'Architecte des Bâtiments de France, de la Direction Régionale des Affaires Culturelles et diverses autres personnes qualifiées et exclut soigneusement les associations locales pourtant les  premières défenderesses de l'urbanisme du patrimoine et de l'environnement dans la société civile. Les autorités ne pourront donc pas se plaindre d'une éventuelle tardiveté.

 

En particulier, les associations susdites souhaitent éviter à tout prix que par des astuces de périmètre ou de règles, la protection annoncée et politiquement vendue au public ne soit en réalité vidée de son contenu ce qui reviendrait à un écoblanchiment d'une gestion locale du patrimoine fort critiquable (l'équivalent français du "greenwashing"). En effet, les trous de la zone tampon envisagée dénotent déjà une volonté de pas répondre aux objectifs de l'UNESCO.

 

 

 

 

 

NOTE CONTEXTUELLE

 

Les sites patrimoniaux remarquables ont été créés par la loi du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine (Loi LCAP). Ce dispositif a pour objectif de protéger et mettre en valeur le patrimoine architectural, urbain et paysager de nos territoires. Les sites patrimoniaux remarquables se substituent aux anciens dispositifs de protection : secteurs sauvegardés, zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager (ZPPAUP) et aire de Valorisation de l'Architecture et du patrimoine (AVAP).

 

La procédure s'effectue en deux phases qui comprennent chacune plusieurs étapes de validation des collectivités et de l'Etat avec une enquête publique à chaque phase. La procédure s'échelonne ainsi sur plusieurs années.

La phase de classement du périmètre, est suivie de la phase d'Elaboration et d'approbation d'un ou des documents de gestion qui sera un Plan de Valorisation de l'Architecture et du Patrimoine (PVAP) et/ou un Plan de Sauvegarde et de Mise en Valeur historique et architecturale exceptionnelle (PSMV). 

 

En application de l'article L.631-1 du Code du patrimoine, la décision de classement du SPR incombe au ministre chargé de la culture qui, préalablement, recueille l'accord de l'autorité compétente en matière de Plan Local d'Urbanisme ainsi que l'avis de la Commission Nationale du Patrimoine et de l'Architecture.

Instituée par la loi du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine, la Commission nationale du patrimoine et de l'architecture (CNPA) est consultée en matière de création, de gestion et de suivi de servitudes d’utilité publique et de documents d’urbanisme institués dans un but de protection, de conservation et de mise en valeur du patrimoine culturel.

Le projet de périmètre et les avis recueillis seront ensuite soumis à enquête publique avant que le ministre ne prenne sa décision de classement.

 

Le classement du périmètre SPR, dès sa création par arrêté ministériel, a pour effet immédiat de soumettre tous les travaux situés au sein de ce périmètre à l'accord de l'architecte des bâtiments de France.

 

I. OBSERVATIONS DE FOND SUR LE PÉRIMÈTRE

 

Le rapport de présentation du périmètre paraît d'une grande qualité et montre une approche très fine de notre agglomération, je tiens à le dire.

Cependant, par contraste, des anomalies liées à des velléités de bétonnage sans contrainte apparaissent plus clairement.

 

Si le rapport de présentation du périmètre n'a pas vocation à préparer le contenu du règlement du site patrimonial remarquable, on notera que les constructions contemporaines ne sont pas prises en considération, le mot contemporain n'apparaissant qu'à trois occurrences. Certes, les auteurs en dénoncent l'impact négatif, sans en tirer la moindre conséquence. Cela augure mal pour leur régulation future.

Il existe certaines erreurs sans gravité par exemple, l'inclusion du terrain de l'ancien abattoir, alors que le terrain est désormais inconstructible et en forêt domaniale.

 

Nous sommes face à deux inquiétudes :

- le risque de déclassement des protections d'abords des monuments historiques, comme cela déjà été le cas à Avon, notamment dans les zones non classées de la SPR;

- le risque d'absence de classement de zones ayant un impact esthétique et urbanistique d'autant plus fort qu'ils sont dans des terrains en friche, non loin d'ailleurs du sud du Domaine national.

 

A cet égard, les associations font observer qu'il existe un certain nombre de secteurs où des projets d'urbanisation future sont clairement envisagés par la collectivité. Même si elle s'en défend, il n'est pas rare de constater une coïncidence de la volonté de celle-ci d'augmenter les surfaces bâties avec les appétits spéculatifs de promoteurs dont on ne peut pas dire qu'il recherche un aspect architectural réellement en lien avec la Ville.

 

A. FONTAINEBLEAU

 

i) Zones exclues du Bréau et Subsistances

 

Sur Fontainebleau, ce qui est très critiquable est d'exclure certaines zones qui forment tampon avec celles ayant un caractère patrimonial exceptionnel et cela pourrait constituer une menace pour le patrimoine protégé.

On constate que le projet de périmètre écarte volontairement les terrains du Bréau et des Subsistances.




Protection au titre des abords de monuments historiques



Périmètre proposé par la CAPF du site patrimonial remarquable de Fontainebleau-Avon

 

 

ii) Justifications de la nécessité de réintégration

 

Ces terrains ont pour origine la forêt royale et participent nécessairement de l'expansion du Château.



 

On fera encore observer que ces zones font partie des espaces militaires et équestres consubstantiels de l'histoire de Fontainebleau, comme le rappelle abondamment et à juste titre le diagnostic du SPR.

 

Malgré l'intérêt des bâtiments militaires de la zone, le caractère extrêmement proche et parallèle au domaine national, on constatera que le classement proposé ne suit plus le périmètre des MH existant.

 

Le rédacteur du diagnostic semble hésiter, mais incline tout de même à porter attention à cette zone :

 

"Néanmoins, la cité Maginot, petite cité-jardin d’avant-guerre et les deux ensembles de petits collectifs qui l’encadrent, méritent d’être identifiés.

Leur proximité avec les Héronnières et en entrée de ce secteur, au débouché de la traversée du site classé de la forêt, méritent que l’on y porte attention dans le cadre du SPR." (p. 172 du rapport)

 


Nous relevons d'ailleurs une insuffisance d'analyse sur ce point :

 

"Le secteur sud présente un patrimoine bâti, lié aux installations militaires, mais dont il est difficile d’appréhender la qualité (secteur inaccessible). Il représente une réserve foncière importante dans l’espace ceinturé par le site classé." (p 171)

 

Cette absence de classement est très critiquable puisque l'on est en visibilité ou co-visibilité des Héronnières (anciennes écuries de Louis XV, entièrement classées au titre des Monuments historiques par l’arrêté du 10 octobre 2008 (modifié par l’arrêté du 22 janvier 2009) et du Domaine National du Palais.

 

L'impact de constructions anarchiques ou d'une contemporanéité inadaptée pourrait nuire à la cohérence de l'ensemble du SPR. Il n'est pas indifférent de relever l'analyse du diagnostiqueur sur les points de vue concernant le Palais notamment aux pages 77-78 : "Les différents chantiers (quartier du Bréau) en cours dans l’agglomération se distinguent à travers les boisements".

Il le précise p. 92 : "Le quartier du Bréau, intercalé entre le bourg d’Avon et la RD, a une relation visuelle directe avec le Rocher d’Avon. L’urbanisme de ce quartier constitué d’équipements alternés avec des boqueteaux forestiers n’offre pas actuellement de liaisons directes avec la forêt elle même[1], alors que la présence de boisements crée une réelle continuité végétale et paysagère."

 

Les enjeux de protection de ce quartier sont encore une fois mis en valeur (p. 93) :

"Dans le quartier du Bréau la lisière forestière a été mouvante entre les 19 et 20eme siècle. Ces boisements de lisière assurent et maintiennent la continuité végétale, paysagère et écologique entre la ville et la forêt. Ils contribuent à la qualité des ambiances et du cadre de vie. […] Enjeux/objectifs : […] Maintien de continuités végétales avec la forêt dans les espaces en devenir (Bréau)."

 

Comment prendre en compte ces enjeux si l'on exclut ces terrains ?

 


Le diagnostiqueur va encore plus loin et veut éviter la ghettoïsation rampante de ces terrains : "Les quartiers […] du Bréau à Fontainebleau concentrent les populations les plus pauvres (taux de pauvreté […] de 20% pour le quartier IRIS du Bréau contre moins de 10% pour les quartiers résidentiels périphériques à l’hypercentre de Fontainebleau).

Cette caractérisation devra être affinée dans le cadre de l’étude du SPR, notamment en matière d’appréciation des besoins sociaux et de leur évolution." (p. 35). Il invite donc à ne pas fermer le périmètre !

 

L'erreur manifeste d'appréciation consistant à exclure la zone est donc patente.

 

On a bien compris que ce choix était déterminé d'abord par la volonté de bétonnage sans qualité esthétique (et sociale) des quartiers militaires du Sud.

 

Cette volonté d'exclure l'avis de l'architecte des bâtiments de France s'oppose directement à l'engagement de le consulter, qui avait pourtant été mise en avant dans le projet de modification du plan local d'urbanisme du secteur Subsistances (notamment pour les dérogations de hauteur selon l'articule 10 du projet de règlement).

La DDT dans sa lettre du 18 octobre 2019 l'avait pourtant vu comme une garantie, certes insuffisante, mais un premier pas obligatoire. Cette règle sera avec le SPR privée de fondement juridique et démontre que la qualité architecturale et paysagère est le dernier des soucis de la municipalité.

 

La délibération permettant les constructions sur les Subsistances persiste à ne pas prendre en considération l'environnement monumental de la zone et à ne pas adopter des mesures architecturales et paysagères de protection : "Les articles concernant les aspects architecturaux restent en l’état compte tenu de la prépondérance de l’avis de M. l’Architecte des Bâtiments de France sur l’ensemble des permis de construire à intervenir. Le règlement est resté en conséquence inchangé" (note précitée, p. 47 et s.).

 

Outre la faiblesse de l'argument, le fait de se cacher derrière la compétence de l'architecte des bâtiments de France constitue, révérence gardée pour cette institution étatique, une incompétence négative de la part de l'autorité d'urbanisme qui abandonne ses obligations. On soulignera en outre que l'ABF n'a qu'une compétence limitée au périmètre des 500 m et encore en visibilité et co-visibilité d'un monument historique.

 

Il est donc évident que le PLU comme l'ABF ne s'occuperont pas de cette zone : c'est bien au SPR de le faire !

 

C'est donc en d'autres termes un moyen habile pour ne pas réglementer la zone et permettre de porter atteinte aux objectifs projetés : cela se combine aujourd'hui avec l'exclusion de ces terrains par le SPR : on voit bien qu'il y a un grave problème de protection.

 

On soulignera que notre inquiétude n'est pas isolée. Il ne s’agit pas d’un caprice d'associations  la Mission régionale de l'autorité environnementale (MRAe) s’interrogeant de son côté sur l’insertion des projets d’urbanisation notamment des Subsistances dans son contexte dans le cadre de l'examen du permis d'aménager et de construire :

"La MRAe note l’absence de perspectives aériennes montrant, avant et après le projet, l’emprise dans son environnement, incluant le périmètre de protection du monument historique « Domaine national de Fontainebleau », le château et son parc, ainsi que la forêt de Fontainebleau. Une analyse des co-visibilites et des vues du site à hauteur d’homme avant et après projet depuis différents points de vue, incluant les bâtiments existants autour du site, sont également attendues".

"La MRAe recommande :

- de joindre à l’étude d’impact l'avis de l'ABF relatif aux bâtiments à conserver, de manière à mieux expliquer le parti retenu ;

- d’établir la cohérence des éléments paysagers prévus dans le permis d’aménager avec ceux présentés dans l’étude d’impact ;

- de produire une analyse des co-visibilités ainsi que des perspectives d’insertion du projet dans son contexte, aériennes et à hauteur d’homme". (avis du 3 juin 2021).

 

 

La demande des associations s’appuie également sur une opinion historique et scientifique fondée. Le 7 février 1931, l'architecte conservateur du Château de Fontainebleau exigeait que le secteur du Bréau et l'environnement des Héronnières fassent l'objet d'un site classé en vue d'en assurer la conservation et ainsi que la protection des vues.

 





 

Certains pourraient estimer que cet avis très complet serait totalement dépassé par son ancienneté.

 

Il n'en est rien, et nous pouvons citer une autorité récente et difficilement contestable (puisque approuvée par les communes et la CAPF), en l’occurrence le Dossier de candidature pour une inscription sur la liste indicative nationale du patrimoine mondial - Proposition d’extension du bien « Palais et parc de Fontainebleau » inscrit sur la liste du patrimoine mondial à la forêt de Fontainebleau (Association Fontainebleau Mission Patrimoine Mondial © Septembre 2018, p. 205) :

 

"Concernant Fontainebleau, le SPR pourrait englober au nord le périmètre assurant la liaison entre la limite du PSMV de Fontainebleau et celle du site classé forestier pour garantir la protection des lisières forestières. Au sud, il est important que les terrains militaires du Bréau peu denses et dont la mutation est inéluctable soient intégrés."

 



Proposition des associations de rectification (en rouge) du projet de périmètre proposé par la CAPF (en violet) du site patrimonial remarquable de Fontainebleau-Avon

 

 

Pour conclure sur ce point nous ferons valoir l'article L631-1 du code du patrimoine dispose : "Sont classés au titre des sites patrimoniaux remarquables les villes, villages ou quartiers dont la conservation, la restauration, la réhabilitation ou la mise en valeur présente, au point de vue historique, architectural, archéologique, artistique ou paysager, un intérêt public.

Peuvent être classés, au même titre, les espaces ruraux et les paysages qui forment avec ces villes, villages ou quartiers un ensemble cohérent ou qui sont susceptibles de contribuer à leur conservation ou à leur mise en valeur".

 

Ces terrains, menacés de constructions sans qualité architecturale et paysagère, sont nécessaires à la conservation et à la mise en valeur de l'environnement monumental et rentrent donc indiscutablement dans les provisions de cette disposition.

 

B. AVON

 

La Paroisse d'Avon est à l'origine du bourg royal.

i) secteur du Parc du Bel Ebat ou du Bois des Carmes et de l'ensemble des espaces entourant le Prieuré des Basses Loges

 

Quant à l'exclusion du secteur du Parc du Bel Ebat ou du Bois des Carmes (dit également de la CRAMIF) et de l'ensemble des espaces entourant le Prieuré des Basses Loges, complément indispensable du monument historique, il s'agit d'une erreur incompréhensible, qui entraîne une réduction des abords protégés qui avaient déjà été réduits précédemment par erreur.

 





Protection au titre des abords de monuments historiques

(le périmètre a déjà été réduit précédemment)

Périmètre proposé du site patrimonial remarquable de Fontainebleau-Avon par la CAPF

 

 

 

 

Le long de la rue des Basses-Loges se trouve le parc du prieuré des Basses Loges et notamment le Paradou de Gurdjieff, qui est un bâtiment historique avonnais (fortement lié à la vie de Katherine Mansfield) qui mériterait une restauration plutôt qu'un environnement bétonné.

 

Il nous sera permis de reprendre la présentation que la commune fait de ce site sur Internet :

En 1456, les religieux reprirent la terre de Changis, fief très important d’Avon. Pendant plus d’un siècle et demi, malgré les guerres et les calamités diverses, le Prieuré continua de remplir les intentions de ses donateurs. Lorsque les Carmes de Touraine s’y établirent en 1632, la vocation charitable du Prieuré disparut. Des difficultés surgirent, des procès, et il fallut attendre les donations d’Anne d’Autriche et de Louis XIV pour voir une renaissance des bâtiments. Celle de la reine Marie-Thérèse permit de créer, au sein du Prieuré, un ermitage avec cloître, chapelle particulière, et six cellules de moines. En 1791, l’ensemble des bâtiments fut vendu comme bien national ; l’acquéreur Pierre Philibert Giot, négociant à Paris, paya l’ensemble 22000 livres. Il fut nommé Maire d’Avon le 25 floréal an VIII (1800). L’église et l’ermitage furent démolis et le Prieuré converti en maison de campagne, ce qu’il demeura jusqu’au début du XXème siècle. Quelques personnages célèbres y vécurent : Alexandre Corréard, ingénieur et libraire, resté célèbre comme naufragé de la Méduse ; l’avocat Labori, défenseur de Dreyfus, y donna de brillantes réceptions. Enfin, en 1922, sa veuve loua puis vendit le Prieuré à Gurdjieff pour y installer son "Institut" où Katherine Mansfield mourut le 9 janvier 1923. Après avoir été la propriété d’un particulier, puis occupé par l’armée allemande en 1940, le Prieuré fut acheté par la Caisse Régionale d’Assurance Maladie après la guerre et transformé en maison de convalescence. Par la suite, elle construisit dans le parc un nouvel établissement laissant le Prieuré à l’abandon au point qu’il faillit être démoli.

En 1991, sous l’impulsion de Geneviève Martin et Jean-Marie Simon, le Prieuré est inscrit à l’inventaire supplémentaire des monuments historiques[2].

En 1992, l’Association des Amis du Prieuré des Basses-Loges fut fondée, dans le but d’en assurer la sauvegarde en proposant de le transformer en espace culturel public. En 1999, le Prieuré des Basses-Loges a été acquis par un promoteur immobilier qui l’a transformé en appartements locatifs.

Aujourd’hui, dégagé des constructions annexes ajoutées au fil du temps, le Prieuré a retrouvé son harmonie architecturale et demeure ainsi un des fleurons de notre patrimoine."

 

Il sera permis de préciser qu'hélas la commune a laissé ravager le parc par un projet d'EHPAD alors qu'en 2018, elle avait précisé qu'il n'était pas menacé et cela avec un périmètre MH déficient. Sa protection définitive est urgente.

 

Plus loin au sud, le domaine du Bel Ebat reçoit également même recommandation de la commune et mérite donc un protection forte :

"« LE DOMAINE DE BEL-EBAT ET SON MANOIR »

Bel-Ebat, ilot de verdure et de calme bordé par les quartiers de la Butte-Montceau en amont et de la Vallée en aval, est un petit bijou à découvrir. L’histoire de ce lieu est méconnue et pourtant si remarquable…

L’ORIGINE DU NOM DE BEL-EBAT : C’est à la meute de chasse d’Henri IV que le domaine doit son nom. Passionné de chasse, le roi décida que cet endroit, pourvu de sources fraîches, serait l’étape idéale pour que ses meutes de chiens puissent s’ébattre. Selon les traités de vénerie (chasse à courre), l’ébat est l’endroit où la meute peut se détendre. Il y a l’ébat du matin et l’ébat du soir. Il décida donc de faire construire un pavillon de chasse. Ainsi fut édifié Bel-Ebat où hommes et bêtes profitaient à loisir des nombreuses sources vives et rafraichissantes de l’endroit. Le nom de Bel-Ebat prenait alors toute sa signification jusqu’à garder aujourd’hui encore l’appellation éponyme du domaine.

LES DIFFERENTS PROPRIETAIRES DU DOMAINE DE BEL-EBAT : Au 15ème siècle, Denis de Chailly, Seigneur de Changis, était propriétaire du moulin de l’Erable situé, à l’époque, à la place de l’actuel pavillon de l’Erable. Le seigneur le céda ensuite aux religieux de la Charité Notre Dame installés au prieuré des Basses Loges. Le ru des Cholets alimentait les sources de la propriété. Il permettait ainsi de remplir le bassin-réservoir situé juste au-dessus de la chute d’eau du moulin et contribuait au bon fonctionnement de ce dernier. Entretenu successivement par de nombreux meuniers, le moulin fonctionna jusqu’à la deuxième moitié du 19ème siècle. Il fut ensuite remplacé en laissant place à l’actuel pavillon de l’Erable. Vers 1850, Bel-Ebat devient la propriété de la famille Marcotte, riches négociants en meubles revenus des Amériques. Dans leurs bagages, ils rapportent un petit tulipier de Virginie qui, 150 ans plus tard, a bien poussé et trône aujourd’hui majestueusement devant l’entrée du manoir. En 1888, l’éditeur de musique parisien Auguste Durand rachète la propriété aux Marcotte. Très amies dans la vie, Mesdames Marcotte et Durand se fréquentent régulièrement et leurs enfants Félix et Jacques étudient dans le même lycée parisien. Quelques années plus tard, Jacques Durand épousera la soeur de son ami d’enfance, Marie. Jusqu’ici simple lieu de villégiature, Bel-Ebat devient alors la demeure familiale des Durand. A la mort d’Auguste, en 1909, Jacques Durand, éditeur comme son père, élu municipal et bienfaiteur de la commune, hérite du domaine. Très investi dans la défense des droits d’auteurs, il a joué un grand rôle dans l’épanouissement et le rayonnement de la musique française. Il décède brutalement en 1928 alors qu’il se promène dans le parc. Sa femme Marie lui survit encore 30 années et c’est à son décès que sa cousine Lola Dommange, mariée à René Dommange, devient la dernière propriétaire du domaine avant d’en faire don à la ville d’Avon en 1979.

LES ILLUSTRES DE BEL-EBAT : Sans la volonté du roi Henri IV, Bel-Ebat n’aurait jamais eu la destinée qu’on lui connait aujourd’hui. Mais la période la plus symbolique de la magnificence de Bel-Ebat est sans nul doute la fin du 19ème siècle et le début du 20ème. En effet, grâce aux éditeurs Auguste et Jacques Durand, de nombreux et illustres compositeurs se sont succédé au manoir de Bel-Ebat. Entre autres, il y eut Gabriel Fauré, Camille Saint-Saëns, Claude Debussy, Paul Dukas et Maurice Ravel, pour les plus célèbres. Hormis le salon de musique où subsiste encore le piano Pleyel sur lequel ces grands maîtres ont exercé leur talent, on retrouve au premier étage les chambres rénovées de Maurice Ravel et de Claude Debussy alors que la chambre de Camille Saint-Saëns est située dans l’angle de la bâtisse. Ensuite, au décès de Jacques Durand, René Dommange continue l’oeuvre entreprise par son cousin. Il poursuit le travail de promotion d’une nouvelle génération de compositeurs de la musique française comme Robert et Gaby Casadesus (hôtes fidèles du manoir, honorés dans la pièce à droite au rez-de-chaussée), Olivier Messiaen, Francis Poulenc, André Jolivet, Henri Dutilleux ou Darius Milhaud."


Propositions de modification du périmètre

 

Nous proposons donc a minima la réintégration de ces espaces patrimoniaux incontestables et revendiqués comme tels par la collectivité :



Proposition des associations de rectification (en rouge) du projet de périmètre proposé par la CAPF (en violet) du site patrimonial remarquable de Fontainebleau-Avon

 

 

 

ii) Hauts d'Avon au sud de la rue Gambetta

 

On peut s’étonner que les Hauts d'Avon au sud de la rue Gambetta ne soient pas dans le périmètre alors qu'ils étaient en limite du domaine forestier royal.





Protection au titre des abords de monuments historiques

(le périmètre a déjà été réduit)

Périmètre proposé du site patrimonial remarquable de Fontainebleau-Avon

 

 

 

 

II. OBSERVATIONS PRÉALABLES SUR LE CONTENU

 

Même si la présente enquête publique n'a pas vocation à se prononcer sur le projet de contenu du SPR, nos associations souhaitent apporter quelques éléments préalables.

 

La charte internationale sur la conservation et la restauration des monuments et des sites (charte de Venise 1964) adoptée au IIe Congrès international des architectes et des techniciens des monuments historiques à Venise en 1964 et adoptée par ICOMOS en 1965 précise :

 "Article 13. Les adjonctions ne peuvent être tolérées que pour autant qu'elles respectent toutes les parties intéressantes de l'édifice, son cadre traditionnel, l'équilibre de sa composition et ses relations avec le milieu environnant." 


La Charte Européenne pour le patrimoine architectural adoptée par le Conseil de l'Europe des 21-25 octobre 1975 indique :

- "7. [...] Il convient de noter que cette conservation intégrée n'est pas exclusive de toute architecture contemporaine dans les ensembles anciens, mais celle-ci devra tenir le plus grand compte du cadre existant, respecter les proportions, la forme et la disposition des volumes ainsi que les matériaux traditionnels."

- "9. Le concours de tous est indispensable à la réussite de la conservation intégrée. Bien que le patrimoine architectural soit la propriété de tous, chacune de ses parties est à la merci de chacun. Chaque génération ne dispose d'ailleurs du patrimoine qu'à titre viager. Elle est responsable de sa transmission aux générations futures. L'information du public doit être d'autant plus développée que les citoyens ont le droit de participer aux décisions concernant leur cadre de vie."


La charte internationale pour la sauvegarde des villes historiques (charte de Washington 1987) adoptée par L’Assemblée Générale d’ICOMOS à Washington D.C., octobre 1987 :

"10. Au cas où il serait nécessaire d'effectuer des transformations d'immeubles ou d'en construire des nouveaux, toute adjonction devra respecter l'organisation spatiale existante, notamment son parcellaire et son échelle, ainsi que l'imposent la qualité et la valeur d'ensemble des constructions existantes. L'introduction d'éléments de caractère contemporain, sous réserve de ne pas nuire à l'harmonie de l'ensemble, peut contribuer à son enrichissement."

 

      La doctrine administrative et artistique des abords confirme qu'il n'est pas interdit l'introduction d'éléments de caractère contemporain, dans des villes patrimoniales, mais sous des conditions draconiennes de tenir le plus grand compte du respect :

- du cadre existant;

- de l'organisation spatiale existante, notamment son parcellaire et son échelle au regard de la qualité et la valeur d'ensemble des constructions existantes;

- le respect de l'harmonie de l'ensemble;

- des proportions;

- de la forme ;

- des dispositions des volumes ;

- des matériaux traditionnels.



 

CONCLUSIONS

 

Les associations signataires donnent un avis favorable au périmètre sous les réserves suivantes, qui si elles n'étaient pas levées équivaudraient à un avis défavorable :

 

1ère réserve impérative : le périmètre doit être étendu à l'ensemble des terrains militaires du sud de l'agglomération

 

2ème réserve impérative : le périmètre doit être étendu au périmètre de protection des monuments historiques avonnais existants ainsi que ceux emblématiques pour faire l'objet de prescriptions d'ensemble en cohérence avec la logique historique

 

Le commissaire-enquêteur voudra bien également rappeler pour mémoire les règles internationales sur la protection du patrimoine.

 

 

 

 

Fait à Avon et Fontainebleau, le 21 septembre 2021.

 

Pour la SPPEF

 

La Correspondante à Fontainebleau

Inès CHAMPETIER DE RIBES

Pour le Bureau du CDAS

 

 

Le Secrétaire

Jean VUAILLAT

Pour le Directoire de Fontainebleau Patrimoine

 

Le Président

Dr Guillaume BRICKER

Membre de la Commission mondiale du droit de l'environnement (UICN)

Pour la SSFVS

 

 

Le Président

Pr Olivier TOURNAFOND

 

Pour les associations, le mandataire commun,

Dr Guillaume BRICKER



[1]           Nous sommes en désaccord sur ce point, car il y a bien continuité géographique.

[2]            On ajoutera que la demande en a été faite par le CDAS d'Avon dont Mme Geneviève Martin était le président à l'époque et appuyée notamment par M. Gérard Dorlé, autre ancien président du Comité.